La gestion des ressources génétiques Le concept de ressources génétiques a émergé dans le contexte de la sélection des plantes et des animaux domestiques. L'expression recouvre l'ensemble des espèces, races, variétés et génotypes, qui peuvent être utilisés à cette fin pour une plante ou un animal donné.
À l'origine, les premiers sélectionneurs de plantes puisaient dans les variétés locales, appelées aussi cultivars primitifs. Progressivement, se sont imposés des cultivars modernes, protégés eux par un droit d'obtention végétale. Ces lignées de sélection et l'ensemble du matériel sont le produit du travail des sélectionneurs. Obtenues en conditions contrôlées, leurs caractéristiques génétiques sont bien connues. Cela explique leur importante valeur pour les entreprises qui en ont la propriété : là est la base de leur compétitivité.
Enfin, on ne peut passer sous silence une dernière source ou composante des ressources génétiques, les formes sauvages et adventices, qui prennent de plus en plus d'importance dans le contexte actuel d'érosion de la biodiversité. Elles représentent un réservoir de diversité génétique qui, encore immergé dans son environnement naturel et en interaction avec celui-ci, poursuit une évolution interdite aux formes cultivées modernes. Les sélectionneurs n'y puisent cependant qu'en dernier recours, car elles véhiculent aussi, évidemment, des spécificités indissociables propres à leur caractère sauvage. Avec les progrès de la biologie, non seulement les formes sauvages de la même espèce biologique (le pool génique primaire) peuvent être utilisées, mais aussi les espèces apparentées (pool secondaire), voire les espèces des genres voisins (pool tertiaire), sans qu'il y ait de limite théorique (Chauvet et Olivier, 1993).
Comme dans d'autres domaines de la conservation, les acteurs et les modalités mises en œuvre – adaptées évidemment aux objectifs et motivations propres à chacun – sont divers. Il s'agit :
– des instituts de recherche, avec les banques de gènes qu'ils gèrent et entretiennent ;
– du secteur privé, constitué notamment par les firmes semencières qui entretiennent des collections de travail et des lignées de sélection très précieuses ;
– des gestionnaires de patrimoine, tels les parcs naturels régionaux, à l'origine de programmes de conservation élaborés et de la relance des produits du terroir.
Les collections de ressources génétiques sont couramment appelées banques de gènes. Elles sont conservées de différentes façons, selon les types biologiques considérés : en verger pour les arbres fruitiers ; en champ pour les plantes pérennes à multiplication végétative ; en chambres froides (à + 4 0C ou à — 20 0C) pour les plantes à graines. Le recours à des techniques de conservation plus élaborées, comme le maintien dans l'azote liquide, est possible pour les cas difficiles ou pour réduire le coût de la conservation et accroître l'intervalle entre chaque régénération, évitant ainsi les risques de dérive génétique.
Chez la majorité des espèces de plantes, les graines sont adaptées pour survivre dans le sol, parfois jusqu'à plusieurs dizaines d'années. De telles graines, que l'on appelle semences orthodoxes, se conservent aisément, après séchage, à + 4 0C ou, mieux, à — 20 0C. De fait, la longévité des graines est d'autant plus grande que l'on abaisse la température de conservation. Ainsi, dans les conditions optimales, les graines de céréales peuvent conserver leur capacité de germination jusqu'à une centaine d'années ; les graines de lotus atteignent plusieurs centaines d'années et le record est détenu par un lupin, avec plus de dix mille ans.
On qualifie de récalcitrantes les graines qui ne se comportent pas de façon normale. Il s'agit, en particulier, de grosses graines comme les glands de chênes ou celles de nombreux arbres tropicaux. Ces graines sont détruites par le froid ou elles n'ont aucune dormance et germent dès qu'elles sont tombées au sol. On a recours alors à d'autres techniques de conservation, au champ (verger ou arboretum) ou in vitro. La conservation in vitro consiste à prélever des fragments de plantes et à les garder en conditions contrôlées sur support de gélose en éprouvette. Cette technique de culture in vitro est plutôt utilisée pour la production en masse de plantes horticoles. L'objectif de conservation suppose, au contraire, de ralentir la croissance. On a alors recours à la cryogénie : les fragments prélevés sont maintenus dans l'azote liquide (de — 150 0C à — 196 0C), ce qui permet une conservation à très long terme.
La gestion des banques de gènes est cependant assez lourde : ces banques nécessitent un entretien et un suivi régulier, qui tendent à se relâcher avec le temps. Elles présentent, en outre, le double inconvénient d'être soumises à des pressions de sélection spécifiques (propres aux conditions de conservation et d'entretien) et d'échapper à la sélection naturelle. Certains généticiens des populations considèrent donc qu'un tel mode de conservation statique ne permettrait pas de fournir les caractères d'adaptation aux changements de l'environnement. Aussi l'idée a-t-elle été émise de développer des modes de conservation dynamique, en cultivant au champ des populations très hétérogènes, qui pourraient évoluer librement et faire apparaître des combinaisons de caractères inédites (Chauvet et Olivier, 1993).
Pour les races d'animaux domestiques, l'entretien de troupeaux in situ reste la meilleure stratégie. Malgré son coût, diverses associations et institutions ont mis en place des programmes de conservation.
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