Aires protégées et conservation de la biodiversité I Aménagement et création de Réserve) Eugenia Naro-Maciel, Eleanor J. Sterling et Madhu Rao Cette module constitue la première partie de la série intitulée “Aires protégées et Conservation de la biodiversité”.
L’objectif de la présente module est d’introduire le thème sur une orientation théorique couvrant le riche et vaste domaine de la littérature traitant des objectifs, de la création et de l’aménagement d’une aire protégée (AP). En fin de compte, cependant, la mise en place et l’efficacité des APs sont influencées par divers facteurs sociaux, économiques et politiques. Par conséquent, la seconde module de la série “Aires protégées et Conservation de la biodiversité II : gestion et efficacité”, s’étend à la gestion et aux aspects humains des APs, incluant la politique, la gouvernance, le financement, l’exécution, l’efficacité, le contrôle et l’avenir des aires protégées. Pour des informations complémentaires se rapportant aux APs dans le domaine marin, voir la module REPC “Aires protégées marines et Réseaux d’Aires protégées marines”.
Introduction Une aire protégée a été définie par l’Union Internationale pour la Conservation de la Naturei comme étant “une zone terrestre et/ou marine spécifiquement dédiée à la protection et à la conservation de la diversité bologiqueii, ainsi qu’aux ressources naturelles et culturelles associées, et gérée par des moyens efficaces, de nature juridique ou autre (UICN, 1994). Bien que d’autres définitions aient été adoptées par des états ou organisations particuliers, celle de l’UICN a été largement reconnue. Les aires protégées, également connues sous les noms de parcs ou réserves, ont été créées à l’échelle international, régional, national, étatique et municipal, et plusieurs d’entre elles sont liées en réseauxiii ou systèmes. origines historiques des aires protegees Les aires protégées possèdent des racines historiques profondes : elles ont existé sous des formes variées au temps des anciennes cultures diverses, remontant au début des sociétés pré-agraires de l’Asie et du Proche Orient (Allin, 1990; Runte, 1997). Il y a 3000 ans, les civilisations chinoises et sud-américaines ont écrits des décrets pour la mise de côté de terrains dédiés à la protection de plantes et d’animaux (Sterling, 2002). Les forêts sacrées qui interdisaient toutes formes d’extraction, représentaient déjà une forme d’aire protégée (Chandrashekara et Sankar, 1998). Les familles royales créaient des réserves tels que les terrains réservés à la chasse au gibier, pour exclure les roturiers (non aristocrates). L’ampleur, sans précédent, du changement écologique provenant de l’essor du colonialisme et de l’expansion européenne incita l’action de conservation et la création d’aire protégée. La plupart de ces mesures coloniales européennes et ces philosophies étaient basées sur d’anciennes principes de conservation indiennes et chinoises (Sterling, 2002). La création des premiers parcs nationaux aux Etats-Unis, comme ceux de Yosemite et Yellowstone, partait d’une philosophie qui évaluait ces aires protégées comme de grands monuments (Runte, 1997). Certains pensaient que le développement de cette tendance à la création de parcs nationaux aux Etats-Unis s’était produit en réponse à la révolution industrielle qui entraînait les êtres humains vers l’altération des paysagesiv naturels à un rythme prodigieux. La transformation rapide et sans précédent de la terre suscitait un appel à la préservation de ce qui était si rapidement perdu (Runte, 1997). aires protegees d’aujourd’hui : type et extension de couverture
Les aires protégées constituent la base des efforts mondiaux pour la conservation de la biodiversité (Margules et Pressey, 2000). Un système global d’APs protège à peu près 105 000 sites, en général, sur environ 20 millions de km2, couvrant 12,2% de la surface de la terre (Chape et al., 2005). Contrairement, en 1982, il a été signalé que ce réseau incluait 3,5% seulement de la surface planétaire. La plupart des APs actuelles sont terrestres, tandis que quelques 2 millions de km2 seulement de l’environnement marin bénéficient de statut d’aire protégée, c’est-à-dire seulement 0,5% de la surface des océans du monde (Chape et al., 2005). La liste des Nations Unies sur les aires protégées contient des informations à jour sur ces aires protégées (http://www.unep-wcmc.org/wdpa/unlist/2003_UN_LIST.pdf). Plus de 4 500 APs ont été créées à partir de traités et conventions globaux divers, incluant les patrimoines mondiales et les Réserves de l’Homme et la biosphère (Tableau 1). Les APs font aussi l’objet d’autres accords internationaux, incluant la Convention sur la Diversité Biologique (CDB), la Convention sur les zones humides d’importance internationale spécialement en tant qu’habitat d’oiseaux d’eau (Ramsar), et la Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage (CMS). La Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (UNCLOS) définit les droits des pays sur les mers territoriaux, un précurseur nécessaire pour la création d’aire protégée marine (APM) (voir aussi la module REPC “Traités internationaux pour la conservation et la gestion marine”). A l’échelle régionale, il existe des aires protégées transfrontalières et des réseaux. L’aire protégée de la patrimoine transnationale des Iles de tortues des Philippines et de la Malaisie, par exemple, était mise en place afin de protéger les populations régionales de tortues marines fortement migratrices. En sachant que les issues de cette conservation dépassent souvent les frontières entre états, la Déclaration sur le Patrimoine de Parcs et de Réserves de l'Association des Nations du Sud-Est asiatique (ANASE) (Bangkok, 1984) a été créée pour protéger onze sites dans les états de Brunei Darussalam, Indonésie, Malaisie, Philippines, et Thailande (www.aseansec.org/1491.htm). En outre, il existe des accords régionaux relatifs aux AP pour les sites européens, notamment le protocole relatif aux aires spécialement protégées et la diversité biologique de la Méditerranée, déterminé par la Convention de Barcelone (1976), qui désigne les Aires Spécialement Protégées d'Intérêt Méditerranéen (www.rac-spa.org).
La couverture d’une aire protégée varie énormément suivant les pays. Dans chaque pays, les superficies peuvent être désignées pour une protection au niveau fédéral, national ou local avec des objectifs variables. Aux Etats-Unis, par exemple, l’ensemble des Réserves naturelles, des Zones de nature sauvage, des Parcs nationaux, des Monuments naturels, des Aire marines de gestion des espèces, et des Aires gérées pour l’utilisation durable/ Aires protégées de ressources naturelles gérées protègent environ 15,8% de la superficie totale (Institut Mondial de Ressources 2003, à partir des données du PNUE-WCMC 2003). Pour de plus amples informations sur les différents types d’APs dans le monde, voir Tableau 1, ou consulter la Base de données mondiale sur les aires protégées (http://sea.unep-wcmc.org/wdbpa/unlist). Les Réserves peuvent être gérées par des gouvernements, des entités privées, des communautés, ou à travers des arrangements de coopération. Pour en savoir plus sur la gouvernance, effectivité, et aspects humains des APs, voir notre autre module REPC “Aires protégées et Conservation de la biodiversité II : gestion et efficacité”.
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